30.3.09

Tasmanie, le re-tour d’une île (12 Février- 25 Février)

C’est par Internet, sur un forum fort utile, que je prends contact avec Sandra et Hélène. Hélène, 24 ans, de Vannes, basketteuse assidue, a fini des études de gestion. Sandra, Lyonnaise de 28 ans, a notamment voyagé en Amérique Latine après des études d’espagnol et d’anglais. Toutes deux ont un visa vacances-travail, commencent à voyager en Australie et ne se connaissaient pas avant d’envisager de répondre ensemble à mon annonce. Nous sommes à Hobart, notre plan est de remonter le long de la côte est jusqu’au nord, où je prendrai le ferry du retour.

Notre première mission est de trouver une tente pour les filles, la mienne n’étant plus vraiment opérationnelle après le mois alpin. Trouver un magasin de camping ouvert après 20 heures est une gageure, mais nous y parvenons et prenons le chemin de la Tasman Peninsula, à l’est d’Hobart. La Tasmanie ce n’est pas grand, la conduite est loin d’être notre activité majeure. Nos dix jours de tribulations passent à toute allure, de parc national en parc national, avec au programme marches épiques, farniente sur le sable blanc et chasse au pingouin. Pour le reste, on dit en anglais qu’une image vaut parfois plus que mille mots. C’est particulièrement vrai en Tasmanie, île où le spectacle de la terre rencontrant la mer, de la mer rencontrant le ciel est toujours renouvelé de manière inédite, éclatante. Dame nature en tenue de gala. Les couleurs de la Tasmanie… Les plages de Tasmanie… Je vous laisse apprécier cette sélection de photos, prises principalement par Sandra et Hélène, mon appareil rendant l’âme. Merci à elles !

Eaglehawk Neck, Tasman Peninsula

Hauy Cape, Tasman Peninsula

Du thon, un opinel, pas de lézard

Raoul Cape, Tasman Peninsula

Fortescue Bay, Tasman Peninsula

Hazard Beach, Freycinet Peninsula

Mount Amos, 400m de granit à gravir, Freycinet Peninsula

Vue sur Wineglass Bay, au sommet

Un friendly wallaby à Friendly Beaches

Coles Bay, vue du camping

Les "fairy penguins" de Bichenot !

Douglas Apsley National Park, rando au fond des gorges

Bay of Fires

Bay of Fires

Mount William National Park

Mount William National Park

La Tamar Valley, région viticole

Sandra est partie vers Sydney, Hélène vers Melbourne… Mais elles se sont retrouvées, ont acheté un van, et sont en ce moment en plein tour de l’Australie !

26.3.09

Le coup de la panne

Les preux chevaliers sont parfois trahis par leurs destriers, la vie est ainsi faite. J’ai beau lui murmurer à l’oreille, lui faire promettre que tout se passera bien, Titine fait sa caractérielle. Notre vertueuse Ford s’accorde un écart de conduite de temps à autre. En Tasmanie, elle donne dans le «Non, je ne démarrerais pas». Problème de batterie, me direz-vous. Il semblerait, oui, puisqu’un «jump start» à l’aide de pinces croco suffit à nous remettre en route. Pourtant le garagiste de Buxton était formel, la batterie charge bien… Toujours est-il que Titine nous fait le coup de la panne 5 fois en 5 jours. C’est le rituel du matin : trouver quelqu’un avec une voiture et ces fichus câbles sous la main. Un jump start = une rencontre savoureuse. Galerie de portraits.

L’Australien en vacances. A Macquarie Heads, sur la côte ouest, première alerte. Nous avons passé la nuit dans un camping fort agréable, situé en bordure d’une baie boisée ponctuée de phares. La voiture ne démarre pas, ok. On est au milieu du camping : dans ce cas, mieux vaut accoster un groupe d’Australiens suréquipés, avec 4x4, caravanes, tentes rétractables et j’en passe. «Australien suréquipé» est un pléonasme, les Australiens adorent avoir du matériel dernier cri, surtout en vacances. Ils ne conçoivent pas de se lancer dans une activité quelconque s’ils n’ont pas le bon matériel, le «gear». Bon, là tout de suite, c’est très appréciable. Le premier pêcheur à qui j’explique notre problème nous dépanne illico, «no worries» (tic de langage signifiant «pas de soucis», la devise nationale, en quelque sorte).

Le ranger philosophe. Au vaste camping du lac Saint Clair, nous passons deux nuits pluvieuses. Au matin, forcément, rebelote. Nous nous tournons naturellement vers les 4x4 et caravanes alentours, mais voilà, il pleut, personne n’est vraiment disposé à nous aider. Notre seul recours est d’aller chercher le «ranger» local, au centre d’informations. Les rangers sont les anges gardiens des parcs naturels australiens, de leur faune, flore… et des visiteurs. D’un air goguenard qui veut dire «vous n’êtes pas les premiers», il nous demande si par hasard on ne voudrait pas faire un petit don pour la sauvegarde du parc. On s’exécute, le ranger rapplique et nous dépanne, s’expliquant : «Vous savez, on est pas vraiment d’accord avec les prix qu’ils pratiquent dans ce camping, c’est très commercial, c’est pour ça qu’on demande un don pour le parc dans ces cas là». Nous faisons mine de ne pas découvrir que le camping est en fait payant. Les sanitaires, la cuisine, c’était donc ça.

Les voisins ruraux. J’ai la bonne idée de nous faire passer la nuit du samedi au fond d’une impasse bien pentue, paumée dans la campagne, aux alentours de Norfolk. Le lendemain, of course, nous voilà cloués… et c’est dimanche matin. Une mamie en pyjama nous explique, tout en essayant de faire taire ses chiens, qu’elle n’a pas le «gear», que son fils est à Hobart pour la journée. Elle nous indique le voisin d’à côté, un type un peu lunaire qui vit seul dans une petite maison bizarre. Il n’a pas de câbles mais il veut bien nous aider… C’est gentil mais comment ? Pendant qu’on l’attend, Mélissa va voir les voisins du dessus, deux hommes assez âgés qui blêmissent quand on explique que le voisin du dessous va arriver pour nous aider. «oh, celui-là, il ne peut même pas réparer sa propre voiture». Ils ont une batterie et des câbles avec eux : «vroum». Le voisin du dessous débarque, salut poli. «Vous devriez prendre soin de votre batterie». On y pensera. Chacun rentre chez soi. Ceux du dessus nous remercient presque : «c’est tellement ennuyant la vie dans cette impasse !».

Le faux ronchon. Extrême sud, nous avons campé deux jours à Cockle Creek, et le verdict du capot ne nous surprend plus. J’essaie de nettoyer les terminaux de la batterie, peut être y a-t-il un mauvais contact du fait de la corrosion ? Hélas non. Mélissa demande de l’aide à nos voisins, qui ont une caravane énorme. Madame fait gentiment la conversation, tandis que monsieur bougonne, rechigne sous son chapeau, c’est mal engagé. Il s’exécute finalement, pince sans rire. Un farceur.

Le marin providentiel. Alors que nous longeons une baie tranquille, j’ai encore une bonne idée : s’arrêter à un site de pisciculture, à Huon Port. L’entreprise «Huon Salmon» a déployé ici de grands enclos circulaires qui font de l’œil au fan de Thalassa qui sommeille en moi. Le verdict tombe : la batterie se décharge, même en plein jour ! Il va falloir faire quelque chose. Problème, tous les propriétaires des voitures alentours sont des pêcheurs, qui sont sur l’eau. Ni une ni deux, la secrétaire passe un coup de fil et un matelot débarque illico, avec une batterie portative «qui sert habituellement aux bateaux». Nous sommes sciés par tant d’efficacité.

Epilogue. Nous faisons un stop chez le garagiste, qui annonce la mort de la batterie, dans une agonie de bulles suspectes. On l’aimait bien, la batterie bleue avec ses bouchons jaunes. 98$ plus tard, nous revoilà en route. Nous n’oublierons pas les visages de nos charismatiques bienfaiteurs.

21.3.09

Tasmanie, le tour d’une île (1er au 11 Février)

Pour l’automobiliste peu averti, Melbourne est un cauchemar. Sens uniques, panneaux lacunaires, tramways… Je manque de rater le ferry, et pourtant j’avais prévu large. Me voilà à bord du « Spirit of Tasmania II», il est 9h et les gratte-ciels s’éloignent lentement. La Tasmanie se mérite : la traversée durera jusqu'au soir. Après deux heures de navigation paisible le long des côtes, on attaque la pleine mer, et la croisière ne s’amuse pas. La moitié des gens rassemblés avec moi dans le petit cinéma de la poupe ne sont pas là pour les films (à base d’animaux bavards), mais pour tenter de garder contenance.

J’embrasse mentalement la terre ferme à Devonport, notre débarcadère, je franchis le Rubicon et rejoins le Narawntapu National Park. Sur la route poussiéreuse qui mène au terrain de camping, j’apercois un wombat à l’air bonhomme. Mon premier wombat ! Encore un marsupial inconnu au bataillon, me direz-vous, et pourtant les wombats sont légions en Australie. Un wombat, c’est une sorte de petit tank en fourrure, ça n’y voit pas à un mètre, c’est drôle comme tout.

Toute l’eau du ciel tombe sur la voiture durant la nuit, je ne regrette pas ma tente. Le climat Tasman est océanique, il pleut un jour sur trois. La Tasmanie est le plus petit des sept États australiens. Les Australiens continentaux se moquent un peu des Tasmans, disant qu’ils sont consanguins et qu’ils ont parfois deux têtes, mais c’est faux bien sûr. Moins d’un demi million de personnes vivent sur cette île où on ne transige pas avec la préservation de l’environnement. C’est ici que sont nés les Verts Australiens, dans la Franklin River.


A la bibliothèque de Launceston, je retrouve une amie de Sciences Po, étudiante à Sydney, qui va m’accompagner dans la première partie du trip, vers le sud en passant par les montagnes. Mélissa est une vraie citadine, et en sa compagnie je me rappelle que la vie des routes et des forêts ne va pas de soi. Beaucoup de fous rires en perspective. Je lui apporte ma connaissance (exponentielle) de la faune locale. Elle m’apporte l’éponge, la semoule et le milk shake, améliorant sensiblement mon quotidien jusqu’ici fait de pâtes, de riz et de vaisselle au doigt. Au volant, elle est Starsky, je suis Hutch.



Notre première destination est Cradle Mountain, icône locale, nichée dans un ensemble de parcs classés au patrimoine mondial naturel. La route qui nous y mène est de toute beauté, des nuages bas rayent les montagnes. Nous trouvons un petit Conservation park moussu où passer la nuit. Dans son arbre, un possum bien gras nous observe. Le possum, c’est encore un marsupial tordant, croisement d’un chat et d’un écureuil, qui vit en ville comme dans le bush.


Nous voilà au bord de Dove Lake, le miroir dans lequel se reflète la fameuse montagne ciselée. Nous entamons l’ascension de Hawson Peak, la pente est raide et on s’accroche à des chaînes pour grimper. Très vite, le point de vue est époustouflant, il y a des lacs de tous les cotés. On s’engage sur face track, le chemin qui souligne la montagne. Mélissa m’attend à un croisement en bouquinant, tandis que je vais voir à quoi ressemble le chemin vers le sommet. Et là, c’est le drame. Malentendu, nous nous croisons sans nous voir. On se retrouve quelques heures plus tard sur le parking, non sans avoir mis à contribution les nombreux marcheurs croisés, y compris un espèce de Français qui trouve très drôle que je cherche une blonde perdue dans la montagne.


Nous explorons durant les jours suivants la côte ouest, notamment les gigantesques Henty dunes, 30 kilomètres de sable brûlant. A Strahan, petit port sympathique, nous sommes mis à contribution dans une pièce de théâtre pittoresque, « The ship that never was », qui met en scène une évasion de forçats tasmans vers le Chili. On me donne le rôle du grand père, et Mélissa incarne un chat avec conviction. Ça nous change de Molière.

Nous passons deux jours aux alentours du lac Saint Clair. Temps humide, mais nous faisons quelques randonnées dans les « forêts de pluie ». A Frenchman’s Cap, je croise un Tiger Snake somnolant, roulé en boule. Nous rencontrons un autre serpent, au ventre jaune, sur le chemin de Shadow lake. On parle de Sciences Po, de masters, de nos amis respectifs, pour oublier un peu toute cette nature angoissante. Au camping, la douche chaude coûte un dollar, les voyageurs Israéliens et Allemands sont bruyants et Mélissa fait du thé Norvégien, au gingembre et au miel. Oui, la Tasmanie, parfois, c’est un peu la Norvège.



Le soleil nous revient à Hobart, la charmante capitale de l’Etat, où se déroule le Wooden Boat festival. 500 bateaux de bois sont rassemblés dans le port, les fanions flottent au vent, ambiance familiale. Nous prenons la route vers Cockle Creek, l’extrême sud de la Tasmanie et donc de l’Australie. Une marche vers South Cape Bay nous mène sur des falaises noires, sur lesquelles les vagues turquoises viennent s’écraser. Un orage passe au large, c’est le spectacle. Nous campons deux nuits sous un arbre géant, avec les wallabies miniature locaux appelés Pademelons.

Mélissa a 20 ans, on mange un mille-feuille, et des pancakes le lendemain matin (parce que c’est encore son anniversaire en France). Un détour par le Hartz Mountain NP, dans la brume et le froid. C’est l’heure de rejoindre Hobart, nous passons une soirée au cinéma, à déprimer devant Revolutionnary Road. Je dépose Mélissa à l’aéroport. Ma mission de demain : trouver de nouveaux compagnons de route pour la côte est.

8.3.09

Les Alpes australiennes, piste verte (30 Décembre 2008 - 31 Janvier 2009)

Il y a des Alpes en Australie, je pense que c'est un scoop. Plusieurs parcs nationaux répartis dans le Victoria et le New South Wales forment un ensemble alpin, regroupant quelques unes des plus belles montagnes du pays. Avec Stef et Nanie, deux compères du road trip des Flinders, nous avons sillonné ces contrées pas énormément populaires à cette période (les australiens viennent y skier l'hiver). Alors que l'été est au plus chaud, nous prenons de la hauteur pour arpenter les chemins des sommets et barboter dans les torrents. Il serait laborieux de vous raconter dans le détail ce mois de road trip, mais voici un petit inventaire. Certaines des photos sont l'oeuvre de Stef, merci ! Et si vous voulez plus d'Alpes, allez donc farfouiller sur son blog.

Deux mille neuf. Alors que nous avons quitté Adelaide depuis quelques jours, nous faisons escale au Langi Ghiran State park, sur notre route vers les Alpes. Une boîte de foie gras est rescapée du colis gastronomique de Noël, que nous dégustons à belles dents. Certainement mon nouvel an le plus insolite à ce jour, au milieu du bush, sous les étoiles et les cris des kookaburras (gros martins pêcheurs et rieurs, un emblème national. "Ils ont deux pattes", précise Nanie). 2009 arrive, on a un peu d'avance sur la France, ce qui nous fait beaucoup rire, à moins que ce soit le vin. Le lendemain, la première surprise de 2009 sera un koala en bas de son arbre, croisé lors d'une petite escapade hors-piste.
Fougères. Je découvre peu à peu les forêts du Victoria, un Etat bien différent de ma South Australia. L'eau est abondante, permettant une explosion de vert. Des fougères arborescentes grandes comme des palmiers poussent au bord des rivières, le climat est tempéré. Dans la State forest de Daylesford, un cours d'eau glacé dévale une pente de rochers moussus. Un bain de pieds express s'impose.
Mécanique. Notre fidèle Ford Falcon tient plutôt bien la route, malgré son âge avancé. Dès le début du trip, elle nous donne cependant quelques sueurs froides. La batterie fait des siennes. Nous avons besoin d'un "jump start" à l'aide de pinces croco à deux reprises au cours du mois. Heureusement, les australiens sur quatre roues motrices sont sympas et bien équipés. A Buxton, nous perdons notre pare-choc arrière. Oops. Une carrossier arrangeant refixe la pièce à coup de vis et de boulons, "façon neopunk", dixit Emilie. Il nous remplace une ampoule en prime, et pour pas un rond, pas un seul. Quand je vous dis qu'ils sont sympas !
Cathédrales. Une longue ascension nous mène sur l'imposante crête rocailleuse du Cathedral Ranges National Park. Les vues sur les vallées environnantes sont majestueuses. En chemin, nous croisons un lézard mâchouillant une libellule, et des oiseaux lyres, reconnaissables à leur queue panachée de beige et de brun. Le soir, nous tentons d'apercevoir des ornithorynques dans la rivière proche du camping, sans succès. J’ai appris récemment que ce parc avait été entièrement dévasté par les incendies du 7 Fevrier 2009, date qui restera connue comme le "Black Saturday". Ces "bushfires", véritables boules de feux alors que les températures et le vent étaient au plus fort, ont fait 210 morts dans le Victoria. Certaines villes que nous avons traversé, comme Buxton ou Marysville, ont été rasées par les flammes. L'Australie a connu peu de drames humains et écologiques de telle ampleur, le deuil est national.

Tire-fesse. Notre premier contact avec les Alpes est la route tortueuse qui mène à Mount Buller, une station de ski censée nous donner un accès au parc national. Erreur, à Mount Buller il n'y a que Mount Buller, une ville morte, hors saison, avec chalets modernes mais sans camping. La nuit tombe, nous décidons de camper... sur les pistes ! Au matin, des montagnes bleues se déroulent à perte de vue. C'est une vision à laquelle nous allons peu à peu nous habituer. Une autre Australie, encore une autre.

Glider. Ce petit marsupial nocturne est quasiment impossible à observer. Pourtant, un soir, entendant du bruit dans l'arbre qui surplombe ma tente, je sors la tête. Un carré noir fend le ciel, et atterri dans un arbre avoisinant, dans un léger bruit d'écorce froissée. Ma torche révèle un animal de la taille d'un chat, qui me fixe de ses yeux réflechissants. Son dos est noir, son ventre est clair. Il peut planer en étendant une membrane qui relie ses pattes avant à ses pattes arrières. Je n'ai pas pu prendre de photo, mais un glider, ça ressemble à ça : (Yellow-bellied Glider, Joel Winter DEC)

Paradise. Dans la chaleur de nos journées, les flèches sur la route qui indiquent des cascades nous font de l'oeil. Un petit détour par Paradise Falls, chute d'eau bien nommée ! Un ruisseau se jette dans vingt mètres de vide, la douche est tonifiante. Tout au long du voyage, de nombreux cours d'eau deviennent nos terrains de jeu, qu'on taquine la truite ou qu'on fasse des ricochets. La déception n'en est que plus grande quand le lit des rivières est vide.
Bogong. Le Mont Bogong culmine à 1986 mètres, ce qui est raisonnable mais suffisant pour en faire le plus haut sommet du Victoria. Notre ascension débute au fond de la vallée, la pente est raide et la route n'est pas droite. Dans la forêt, nous observons un gang de Gang-gang cockatoos, des perroquets gris à tête rouge. Plus haut, la vue sur la vallée se dégage : les flancs des montagnes sont recouverts d’arbres nus, blancs, conséquence d'incendies passés. Le sommet est parsemé de fleurs, on savoure un lunch avec vue (voir la première photo du post).

Huttes. C’est un peu la marque de fabrique des Alpes Australiennes. Le magazine Australian Geographic leur a même consacré son dernier dossier. Les huttes sont des vestiges de la vie des premiers colons qui ont habité ces montagnes. Toits de tôle, parois de rondins, tables et tabourets polis par mille gestes : les huttes sont généralement très bien conservées par diverses associations. Elles sont aujourd’hui des refuges pour les randonneurs, qui racontent des anecdotes dans les “vistors books”. Aux murs, parfois, des journaux jaunis racontent les préoccupations d’un autre temps.

Affres. Nos tentes made in China achetées pour une poignée de dollars font les frais des montages/démontages répétés. Les arceaux cassent, on arrange des atèles avec des branches souples, ce qui donne aux tentes des airs de sculptures néo-surréalistes. Les orages alpins mettent à l’épreuve l’imperméabilité des toiles : on se retrouve une nuit à dormir à trois dans la voiture, une autre à camper au sec dans les toilettes spacieuses du Namadgi National Park. Dans le Victoria, le froid est vif au matin. Sous des chaleurs dépassant allègrement les 40 degrés, la vie de camping n’est pas des plus agréables, à l’heure où il faut quitter les bibliothèques climatisées. Et que dire des assauts répétés des insectes, au Lakes National Park, par exemple. Au ballet crépusculaire des dauphins et des pélicans succèdent les escadrons de moustiques, alors que nos bières sont à peine entamées. Dur, non, vraiment.


Kosciuszko. C’est le plus haut sommet australien (2228 m), et c’est aussi le nom du parc national qui l'abrite. Une randonnée hors-piste nous mène au milieu de blocs rocheux imposants, surplombant les vallées alentours. On pense à l’Irlande, au Seigneur des Anneaux, on pense que c’est grandiose et désert. Au sol, le crottin des brumbies, les chevaux sauvages qui habitent les lieux. Pas un seul à l’horizon, hélas. Quelques jours plus tard, c’est l’ascension du Mont Kosciuszko, après une nuit de camping qui a vu des gouttelettes de glace se former sur nos tentes. Des eaux pures dévalent les pentes pelées, c’est ici que la Murray River, plus grand fleuve australien, prend sa source. Notre chemin contourne des lacs verts, abris d'une minuscule truite de montagne. Des australiennes réchauffées nous dépassent en petite foulée. Puis c’est le sommet, colonisé par une espèce introduite commune, le touriste fainéant. Nous avons emprunté une boucle de 20 bornes pour arriver au point culminant, mais il y a aussi un téléphérique !

Canberra. La capitale a mauvaise réputation, taxée de ville ennuyeuse peuplée de fonctionnaires. Bon, c’est vrai que les messieurs et dames en costume, portable vissé à l’oreille et badge autour du cou sont légion dans les rues. Mais la ville est plaisante à vivre, selon Stef qui a vécu ici. Nous y passons deux jours, le temps pour moi de visiter des musées nationaux et le Parlement. Surtout, Canberra a la chance d’être toute proche de l’étonnant Namadgi National Park, un vrai concentré d’Australie. Vallées d’herbes jaunes sous un ciel d'orage, d’innombrables kangourous, peintures aborigènes à même la roche, forêts denses, cacatoès “à crête de souffre”... Un festival.

Brumbies. Dans le Kosciuzko National Park, sur une route traversant une plaine, Stef s’exclame : “les brumbies !”. A flanc de colline, il y a en effet une vingtaine de chevaux sauvages. On sort de la voiture, on s’élance à travers les herbes hautes, on traverse un marécage en sautant sur les touffes d’herbe. Les chevaux sont juste là. Bientôt ils remarquent notre présence, se mettent à galoper. On court aussi, ils passent juste devant nous. Ils disparaissent derrière la colline, le chef de troupeau restant quelques secondes sur la crête pour nous toiser. Comme c’est étrange de voir des chevaux vivre en troupeau, avoir le comportement d’une meute. Ils ont été introduits par les colons, mais maintenant ils font partie du folklore australien. Les brumbies causent cependant des dégâts d’errosion, ont de gros besoins en eau, entrent en concurrence avec la faune native… “They are pest”, nous dira plus tard un campeur australien. Mais quand même, des chevaux sauvages, ça frappe l’imagination. Vidéo !

Magic. Les trous d’eau de Blue waterholes sont vraiment bleus, encore une couleur étonnante que prend l’eau des torrents dès que la profondeur est suffisante. L'eau est glacée, comme nous pouvons le constater en traversant la rivière, sur le chemin d’une randonnée qui nous mène au fond d’une gorge spectaculaire. Le défilé rocheux se termine par une cascade, en contre-bas. Après ce retour dans le Kosciuszko NP, nous en sommes convaincus, les Alpes recèlent bien des trésors cachés.

Le road trip s'achève à Melbourne pour Stef, qui rentre à la Réunion, et pour Nanie, qui va voyager un peu avec sa mère avant de rentrer en France. Pour moi, la route continue en Tasmanie. Je vous retrouve dans le ferry.